de Joris LACHAISE
72 minutes, 2011
Comment un film qui prend comme point de départ la post-colonisation en Afrique rejoint la question plus générale de la colonisation des esprits et des corps par toutes les formes de « conventions »?
Et comment, la célébration du cinquantenaire de l’indépendance au Mali, ce mois de septembre 2010, devient matière à interroger la fonction du rhapsode, de celui qui raconte et par conséquent crée ?
Car on ne dit pas l’histoire impunément. On choisit de se servir, ou pas, d’une syntaxe, d’un vocabulaire, d’un protocole.
L’auteur de « Convention » opte, lui, pour la troisième personne. Il décide de tenir à distance, comme un objet placé sous le collimateur de la caméra, son propre regard de blanc, ce maître étalon qui n’a pas fini de formater l’Afrique. C’est une posture de retrait qui ne s’efface pas, une position critique. C’est une attitude de guetteur aussi qui capte sous les lois d’un montage kaléidoscopique les différents états du corps décolonisé.
A la croisée du documentaire, de l’autofiction et du poème filmé, « Convention » est un film qui revendique sa nature de forme-projet. Libre, digressif, inventif, il incite à penser l’histoire sans didactisme et interroge les conditions et les conséquences de l’acquisition de la liberté.
Né en 1980, Joris LACHAISE vit désormais entre Marseille et Paris. En 1999, Il rencontre Jean Rouch. Après une maîtrise de philosophie, il entreprend un DEA qui le conduit sur le terrain de l’investigation documentaire. Parallèlement à ses travaux liés à une anthropologie de la mort, et à ses questionnements politiques sur le statut des collections d’ethnographie du Musée de l’Homme, il devient cadreur et monteur pour le cinéma. Il collabore d’abord avec Jean-Pierre Krief et Arte à la réalisation d’un film sur le Tribunal Spécial Irakien. Puis il réalise des pièces vidéo sur la base de compositions sonores, qui sont présentées à Paris, Nantes, Cahors, Marseille, Lisbonne. Ses derniers travaux l’ont conduit pendant un an, avec Thomas Roussillon, dans la co-réalisation d’un long-métrage documentaire sur le combat de demandeurs d’asile érythréens et soudanais à Angers. Il participe la même année à la fondation de l’association marseillaise Babel XIII dédiée à la réalisation et à la diffusion d’œuvres documentaires multimédia. En 2011, son long-métrage réalisé au Mali, intitulé « Convention : Mur Noir / Trous Blancs », a été sélectionné dans plusieurs festivals de documentaire. Il travaille actuellement à un long-métrage sur la pratique institutionnelle de la psychiatrie en Afrique noire.